jeudi 26 mai 2016

ELO#232 - Orelsan, les femmes et youtube


25 mai 2016

Je suis mal à l'aise sur le sujet d'Orelsan, et je ne m'étendrai pas. D'un côté, il ne fait pas de doute que les paroles incriminées des chansons d'Orelsan sont sexistes, et que la légereté avec laquelle il parle de violences faite aux femmes contribue à leur oppression. D'un autre côté, je vois dans certaines des attaques contre Orelsan des ressemblances frappantes avec les attaques contre le rock'n'roll des années 1950. Quand Orelsan est relaxé par la cour d'appel de Versailles en février dernier, j'entends de vieux blancs (oui, la couleur de peau est importante ici aussi) qui dénoncent le rap comme de la musique de sauvages et de malotrus.

Le sexisme de Léo Ferré ou de Jacques Brel n'est pas dénoncé aussi violemment, et j'ai bien peur que si, de plus, Orelsan avait été noir, le tribunal n'aurait pas trouvé autant de circonstances atténuantes (se souvenir du parcours judiciaire de Hamé par exemple).

Je préfère donc attaquer Youtube, pour complicité de banalisation des propos sexistes d'Orelsan. En effet, son clip Saint Valentin, présent sur Youtube depuis 2007 n'a jamais été censuré, ni même été accompagné d'un avertissement ou de limitation aux majeurs.

En revanche, la réponse du groupe féministe C.L.I.T, postée sur Youtube le 8 mars 2016, a été censurée au bout de deux jours pour « contenu sexuellement explicite », puis a été remise en ligne avec un avertissement et une limitation de son visionnage aux majeurs!

Voici donc ce clip sur vimeo:

A ce propos, voici la playliste de la manif féministe de mars dernier:

Et une autre playlist, de femmes chanteuses de reggae, The Best Of Studio One Women:
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Un clip pour la nouvelle chanson de Charles Bradley, Ain't It A Sin:

Une heure avec Roy Ayers à Amsterdam l'été dernier.

I Forgot to be Your Lover, une magnifique chanson de William Bell, qui commence par la phrase "Have I told you lately that I love you", dont Van Morrison fera une chanson...

La vie de la chanteuse Betty Davis mise en BD par Pénélope Bagieu sur son blog dans Le Monde.

A propos de la bande dessinée Quoi de plus normal qu'infliger la vie? d'Oriane Lassus, voici une interview...

Et pour sourire, DJ Jesus:

jeudi 19 mai 2016

ELO#231 - Sa dernière playlist: Tchao Bob!


18 mai 2016

Depuis le temps qu'il était malade, Siné avait pas mal pensé à sa mort, à ses obsèques, et aux journaux qui sortiraient après sa mort, y compris cet hors-série qui paraît aujourd'hui: Ma vie, mon œuvre, ma mort !

Bob adorait s'occuper de la musique pendant les fêtes, et il préparait ses playlists avec soin. Sa dernière playlist le démontre, il aimait alterner les rythmes et les styles, et surprendre ses auditeurs.

Ainsi, la playlist de la crémation de Bob commence par le Kol Nidre, une prière juive qu'on chante le soir de Kippour, chanté par le crooner américain Johnny Mathis en 1958. Elle s'enchaîne par deux hymnes politiques de mai 1968 chantés par Dominique Grange (présente en personne pendant la crémation). Si le premier est le plus connu (A Bas l'Etat Policier), le second sonne comme un message aux survivants: Chacun de Vous est Concerné!

La suite du programme évoque les styles musicaux qui ont fait danser Bob toute sa vie et qui continuaient à l'émouvoir à 80 ans passés: la salsa avec Willie Colon (Che Che Cole, 1969), et le jazz sous toutes ses formes avec Nina Simone (Don't Let Me Be Misunderstood, 1964), Frank Sinatra avec l'orchestre de Count Basie (Fly Me To The Moon, 1964), Eddy Louiss (Funky Day, 1987) et bien sûr Billie Holiday, sa préférée, là aussi avec l'orchestre de Count Basie (God Bless the Child, 1952). Les titres et les paroles se prêtent à des obsèques, mais il ne faut pas trop les prendre au pied de la lettre...

Interlude politique encore, avec Dominique Grange, dont le slogan de 1968 est encore d'actualité et à la une de Siné Mensuel (Grève Illimitée, 1968), mais aussi avec l'hymne de Carlos Puebla dédié à Che Guevara, l'un des héros de Bob, mort trop tôt pour avoir retourné sa veste (Hasta Siempre, 1965).

Tous les ingrédients sont là: la musique latino-américaine, le jazz et la politique, mais Bob mettra le soin habituel à en faire le cocktail juste, en soignant les enchaînements, les morceaux connus et les pépites bien cachées: ainsi l'un des premiers titres de Nat King Cole (I'm Lost, 1943) ou celui la chanteuse de gospel Dottie Peoples, qu'il avait découverte pendant le festival de jazz de la Nouvelle Orléans en 1996, alors que ce mécréant ne quittait pas la tente gospel (It's So Hard to Get Along, 1993).

Retour à la politique et, avec La Pègre (1968), Siné termine l'hommage au premier 45 tours politique de Dominique Grange, suivi du classique révolutionnaire Les Mains Blanches, chanté ici par Marc Ogeret, toujours en 1968.

Si l'occasion se prête aux chansons tristes, Lonely Avenue de Ray Charles (1957) ou Ne Me Quitte Pas, en version salsa par Yuri Buenaventura (1996), la rigolade n'est jamais loin, et comment ne pas se souvenir des petits yeux rieurs de Bob, serrant les poings, oscillant et chantant en rythme, à chaque fois que retentissait le Oo-shoo-be-doo-bee par Dizzy Gillespie (1952), ou un bon morceau de soul comme Papa Was a Rolling Stone (1972).

Bob n'était pas hermétique à de nouvelles découvertes et aux métissages, comme le mélange de tango argentin et de musique électronique de Gotan Project (Queremos Paz, 2001), ou le mélange de musique classique (la Passion selon Saint Jean de Bach) et de musique gabonaise de Lambarena (Sankanda, 2009).

Retour aux grands classiques de ses héros la soul, le Try a Little Tenderness, dans sa version par Otis Redding (1966) et le What'd I Say de Ray Charles (1959), avant de céder à l'une des faiblesses de Bob, son amour pour les guimauveries, avec le You are so Beautiful, dans sa version par Joe Cocker (1974), et le Eli Eli, poème religieux juif écrit par Hannah Szenes (exécutée par les nazis en 1944), et chanté ici encore une fois par Johnny Mathis (1958).

A ce qu'on m'a raconté, après cette playlist d'une heure et demi, la foule -la larme à l'oeil- a spontanément enchaîné en entonnant l'Internationale...

Sa dernière playlist: Tchao Bob
https://www.youtube.com/playlist?list=PLrge6p12LY30j9J0TxsEyfiaqAvLaKFcs

Kol Nidre - Johnny Mathis (1958)
À Bas L'Etat Policier - Dominique Grange (1968)
Chacun de Vous Est Concerné - Dominique Grange (1968)
Che Che Cole - Willie Colon (1969)
Don't Let Me Be Misunderstood - Nina Simone (1964)
Fly Me To The Moon - Frank Sinatra avec l'orchestre de Count Basie (1964)
Funky Day - Eddy Louiss (1987)
God Bless The Child - Billie Holliday avec l'orchestre de Count Basie (1952)
Grève Illimitée - Dominique Grange (1968)
Hasta Siempre - Carlos Puebla (1965)
I'm Lost - Nat King Cole (1943)
It's So Hard to Get Along - Dottie Peoples (1993)
La Pègre - Dominique Grange (1968)
Les Mains Blanches - Marc Ogeret (1968)
Lonely Avenue - Ray Charles (1957)
Ne Me Quitte Pas - Yuri Buenaventura (1996)
Oo-shoo-be-doo-bee - Dizzie Gillespie (1952)
Papa Was a Rolling Stone - The Temptations (1972)
Queremos Paz - Gotan Project (2001)
Sankanda - Lambarena (2009)
Try A Little Tenderness - Otis Redding (1966)
What'd I Say - Ray Charles (1959)
You Are So Beautiful - Joe Cocker (1974)
Eli Eli - Johnny Mathis (1958)

Autour du cercueil de Siné, hommage des dessinateurs qui se jettent sur cette boîte en bois, avides comme des termites:
Un dernier doigt d'honneur au cimetière Montmartre:

Siné n'était pas très connu aux Etats-Unis et le plus grand journal de BD américain (The Comics Journal) m'a demandé d'écrire une biographie du grand Bob:

A World Without Siné
Dror, The Comics Journal, le 16 mai 2016

Je l'ai traduite en français et publiée aussi dans The Dissident:

Le monde sans Siné
Dror, The Dissident, le 16 mai 2016
http://the-dissident.eu/10661/le-monde-sans-sine/

Un bel hommage musical lui avait été rendu par Jacques Périn dans Soul Bag le 6 mai dernier, mais je l'avais raté:

Siné
Jacques Perrin, Soul Bag, le 6 mai 2016
http://www.soulbag.fr/news/index/pn/3/type/news

Et les reportages de Serge Quadruppani:

Merci Bob
Serge Quadruppani, le 11 mai 2016

Ciao
Serge Quadruppani, le 12 mai 2016

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#NuitDebout - Plus jamais couchés!


Tout le monde déteste la police:

Par précaution, quelques conseils en manif
Rebellyon, le 14 mars 2016
https://rebellyon.info/Conseils-en-manif-mars-2016-15935

Les gaz lacrymogènes : petit guide pratique de secourisme
Mars Infos, le 12 mai 2016
https://mars-infos.org/les-gaz-lacrymogenes-petit-guide-1124

Nuit Debout : le mois le plus long
Ferdinand Cazalis, CQFD, mai 2016
http://cqfd-journal.org/Nuit-Debout-le-mois-le-plus-long

La "nasse", ou l'importation du "kettling"
Lundi Matin, le 9 mai 2016
http://lundi.am/Kettling

A quoi jouent les forces de l’ordre depuis le début du mouvement ?
Paris-Luttes Info, le 10 mai 2016
https://paris-luttes.info/a-quoi-jouent-les-forces-de-l-5647?lang=fr
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Quelques nouveaux titres de blues-rap par Scarecrow (sortie du disque le 24 juin):
http://blueshiphop.bandcamp.com/album/left-behind-2015

Quelques dates de leur prochaine tournée:
26 mai Toulouse (Le Bikini)
30 mai Paris (Le Pan Piper)
14-15 juin Montréal (Francofolies)
17 juin New-York (Drom)
6 juillet Londres (Rich Mix)

Et pour sourire avec la Palestine...

Les soutiens de Benjamin Netanyahu
Le moment Meurice, France Inter, le 12 avril 2016

mercredi 11 mai 2016

ELO#230 - Sans Siné


Dessin issu de Siné Massacre numéro 9, consacré au colonialisme (avril 1963).


11 mai 2016

Très triste de perdre Siné, un ami, une boussole politique, un grand artiste. Très triste de ne pas être en France pour partager la peine et les grandes rigolades qui ne manqueront pas d'arriver lors des réunions de ses ami.e.s, à commencer par celle de ses funérailles aujourd'hui à 16h30 au cimetière Montmartre (30e division). Vêtements noirs et fleurs rouges...

Je pense que ce sont les écrits de Siné qui m'ont rendu anarchiste, ou du moins fan de l'anarchisme, ou allergique à l'autorité (flics, militaires, patrons, curés, État, Nation, et toutes leurs vaches sacrées...). Son cheminement politique, fait de rage, d'intégrité et d'instinct, l'a toujours mené là où il fallait, à commencer par les Algériens et toutes les autres victimes du colonialisme français, puis Malcolm X et les noirs américains. Après 1967, c'est aux côtés des Palestiniens qu'il se placera inconditionnellement, y compris pour les défendre contre Val, le rédacteur en chef de Charlie Hebdo quand il y écrivait. Cette cause sera tellement importante pour lui qu'il exigera qu'une chronique soit consacrée à la Palestine dans CHAQUE numéro de son journal (hebdomadaire puis mensuel).

C'est Siné aussi qui, à travers ses chroniques, m'a fait découvrir le Flamenco. Car sa colère était compensée par un amour des belles choses de la vie, principalement sa femme, ses amis, les chats, la fête, le vin... et la musique, et en cela aussi il était un modèle. Ca fait tout juste 20 ans que je le connaissais: nous étions tous les deux au Festival de Jazz de la Nouvelle-Orléans de 1996, et je lui avais écrit suite à ses chroniques. Il m'avait alors invité chez lui, on avait surtout parlé de gospel, de jazz, et puis j'avais rejoint le groupe d'amis (y compris de Charlie Hebdo) qu'il aimait inviter pour faire la fête. Les fêtes se sont enchaînées pendant 15 ans, et puis il y a eu l'épisode de l'Hebdo, où il m'a fait confiance pour la chronique musicale pendant un an et demi, alors que je n'avais aucune expérience dans ce domaine. C'est cette confiance quasi-paternelle qui fait qu'encore aujourd'hui, j'écris à droite et à gauche. On se voyait alors souvent, et on parlait encore beaucoup de musique, jazz, soul, funk, flamenco, salsa, musiques africaines... C'est là aussi que je me suis fait un paquet d'ami.e.s, français.es et québécois.es, avec qui je pleure aujourd'hui...


Puis les fêtes s'étaient calmées depuis 5 ans, avec la maladie. On se voyait encore au journal (devenu Mensuel), quand j'y passais (de moins en moins souvent), et si son corps se barrait en couilles, son cerveau, sa verve, sa colère et son amour étaient encore intacts. Il y a deux mois, il portait encore plainte contre BHL et, le mois dernier encore, il pleurait sur la décrépitude de Renaud. Autant ses dessins se passaient parfois de texte, autant ses textes étaient d'une richesse d'adjectifs incroyables, d'expressions créatives et de métaphores hilarantes, jusqu'à celui écrit la veille de sa mort.

Siné, avec d'autres, est largement responsable de ce que je suis aujourd'hui. Contrairement à toutes les prédictions, sa rage ne s'était pas émoussée avec le temps et, jusqu'au bout, personne n'aurait jamais pu le dé-radicaliser. Pour toutes ces raisons, il reste un modèle pour moi, et j'espère comme lui ne jamais ramollir du bulbe...

Brèves:
-Inconsolable depuis la mort de Prince, Siné se laisse mourir...
-En l'honneur de Siné, l'hôpital Bichat s'appellera dorénavant l'hôpital Bitte Chatte
-Charb, rancunier, ne s'associe pas à la pluie d'hommages rendus à Siné
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Tanx s'était engueulée avec Siné. Mais quel talent, ces deux là: Tanx, à rebrousse-poil
Roderic Mounir, Le Courrier (Genève), le 18 mars 2016

Un article sur la bonne santé de la BD en arabe: Ebullition!
Emmanuel Haddad, Le Courrier, le 1er avril 2016
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Avec tout ça, j'ai aussi eu le temps d'écrire un texte sur Prince et la politique, dans un journal en ligne qui a du mal à joindre les deux bouts, The Dissident:

Un Prince engagé
Dror, The Dissident, le 5 mai 2016

Vous pouvez chercher sur internet le clip de Face Down (1996), et trouver la suite des hommages à Prince mis à jour sur ma chronique...


jeudi 5 mai 2016

ELO#229 - Rap mondial

4 mai 2016

On se souvient de la chanson Gaza, quasiment improvisée sur une plage à Beyrouth par le collectif Fareeq El-Atrash.


L'un des chanteurs est Chyno, un rappeur libanais d'origine syrienne et philippine, qui a aussi vécu en Arabie Saoudite et en Espagne, c'est ça aussi la mondialisation. Il vogue maintenant en solo, et bénéficie de clips très travaillés:

O.P.P. (2013):

Fight or Flight (2014):
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Autre musique:

Voici deux nouveaux morceaux québecois, Ain't Going Nowhere, un funk de Fredy V. et Helicopters on the Nightshift, un beat de DJ Sandhill et Stefan Christoff.

Voici 20 minutes de blues avec un jeune musicien, Jamell Richardson.

Et voici une version d'Amy Winehouse d'une chanson dont j'ai déjà parlé ici, I Love You More Than You'll Ever Know, morceau de Blood, Sweat and Tears (et non pas de Donny Hathaway)...

Le 7 mai, de 13h à 22h, salle Olympes de Gouges (15 rue Merlin, P11): La Fête du NPA, avec un meeting, des débats, à 13h30 la projection du film "Merci patron !" et, à 20h... un concert de Sidi Wacho!

Le 14 mai à 16 heures, à Gibert Joseph Barbès (15 bd Barbès, P18): débat sur Prince avec Frédéric Goaty, Raphael Melki, Laurent Calhoun, Anne B. et Chakib E., spécialistes français de Prince.

Le 27 mai à 20h30, Upstairs (1254 MacKay, Montréal, QC): Malika Tirolien Quintet
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Palestine:

Une seule solution pour BDS: l'ironie?


Ou alors le soutien d'artistes comme Narcy, un rappeur canadien lors d'une soirée pro-palestinienne de Montréal:


La Palestine à #NuitDebout: le 15 avril, le 16 avril, le 21 avril, le 22 avril, et encore le 22 avril!

Et Beyoncé place de la République le 1er mai dernier:
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Mes dernières contribution dans le Psikopat:

Février 2016:
Vivons heureux en attendant la mort... (la fin du monde est pour 2030)
Mars 2016:
Deux poids, deux mesures (récentes décisions de "justice" en France...)
Mon article d'Avril 2016 a été censuré, mais il a été publié par le Couac à Montréal:
La Karma Police (La France ressemble à 1984)