jeudi 22 août 2013

ELO#155 - La musique africaine, le rock, la musique classique et le jazz boycottent israel!!!

Jeudi 22 août 2013

L'Israfrique passe aussi par la musique
Le Courrier (Genève), 14 août 2013, page 2
Campagne BDS France

L'invitation faite ce mois-ci à plusieurs artistes maliens, Salif Keita et le couple Amadou et Mariam, de se produire au Festival de musique sacrée de Jérusalem (du 20 au 23 aout) a fait couler beaucoup d'encre. Inévitablement, comme nous l'avions fait en début d'année avec Erik Truffaz ou Jacky Terrasson, ces artistes ont reçu des courriers émanant de la campagne internationale de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS), les appelant à ne pas se produire dans un pays qui pratique l'apartheid, la colonisation et refuse le droit au retour de millions de réfugiés palestiniens (1). En attendant que ces musiciens prennent leur décision en conscience, nous nous posons également quelques questions.

En effet, ces invitations mettent en lumière la nouvelle politique de séduction que l'Etat israélien mène depuis peu, à l'attention de certaines communautés d'Afrique. La politique israélienne à l'égard de l'Afrique, ou Israfrique, tente d'abord de faire oublier sa longue collaboration avec l'Afrique du Sud du temps de l'apartheid. En dehors des discrets contrats de ventes d'armes et de matériel d'espionnage passés avec de nombreux gouvernements africains, elle s'est singularisée par son engagement dès 2007 aux côtés des rebelles au Darfour, et aujourd'hui avec le Sud Soudan et ses ressources pétrolières et minières, contre le régime de Khartoum. Pour ce faire, l'Etat israélien emprunte une rhétorique simpliste et trompeuse, opposant des "Africains" soutenus par Israël, contre des "Arabes" qu'on imagine proches des Palestiniens. Cette description volontairement raciste passe sous silence le fait que tous les protagonistes sont africains et noirs et qu'ils sont pour la plupart arabophones et musulmans.

Ces liens avec l'Afrique occultent la situation des Africains en Israël. D'abord, il faut rappeler que tous les citoyens ne bénéficient pas des mêmes droits et du même accès aux services publics, selon qu'ils sont juifs ou d'une autre religion, chrétiens ou musulmans. Une soixantaine de lois ont été identifiées comme clairement discriminatoires, et pas moins de 14 obstacles administratifs rendent plus difficile aux non juifs l'accès à l'université, pour ne prendre que cet exemple. Par ailleurs, les juifs d'origine éthiopienne y sont notoirement discriminés et un scandale récent vient de révéler que les femmes ont subi des campagnes de contraception forcée pendant de nombreuses années. Quant aux autres immigrés africains, non juifs, illégaux ou supposés tels, plusieurs douzaines d'entre eux ont récemment été blessés lors de pogroms racistes dans les rues de Tel Aviv. On a même entendu la députée Miri Regev qualifier l'immigration africaine de "cancer de la société israélienne". Le gouvernement israélien n'est pas en reste puisqu'il les qualifie d'"infiltrés", leur interdit d'envoyer de l'argent dans leurs pays, arrête hommes, femmes et enfants et les entasse dans le camp de Saharonim, près d'Eilat, avant de les expulser, parfois en accord avec leur pays d'origine et en échange de nouveaux contrats d'armement!

C'est dans ce contexte que la politique israélienne à l'égard de l'Afrique passe aussi par la musique. Plusieurs officiels israéliens l'ont reconnu, la politique culturelle israélienne est partie intégrante de sa stratégie politique internationale, et en particulier de ses efforts de propagande pour améliorer son image. Sans l'aide du gouvernement, comment un promoteur israélien pourrait-il inviter des musiciens africains, sachant qu'Israël est un petit marché et qu'il n'est pas sur la route des tournées habituelles? Ainsi, il n'est pas étonnant que des instances étatiques israéliennes, comme celle qui organise le Festival de musique sacrée de Jérusalem, cherchent à s'associer à un pays africain, le Mali en l'occurrence, qui fait la une des journaux pour une guerre présentée également comme un conflit entre "Africains" et "Arabes". Alors que des artistes maliens ne s'étaient que très rarement produits en Israël auparavant, depuis deux ans, les invitations pleuvent: Oumou Sangaré, Vieux Farka Touré, Amadou et Mariam, Fatoumata Diawara, Tinariwen, et maintenant Salif Keita.

Dans les années 1970, marquées par des décennies de lutte contre la colonisation, les artistes africains se rangeaient spontanément du côté des Palestiniens et auraient refusé de telles invitations. Aujourd'hui, pour des raisons contractuelles, il est plus difficile pour les artistes de mettre en avant la motivation politique de leurs annulations, et ils vont prétexter un conflit d'agenda, la fatigue ou la crainte pour leur sécurité personnelle. Malgré tout, de plus en plus d'artistes africains s'engagent publiquement dans des actions de boycott culturel de l'Etat d'Israël: la Malienne Oumou Sangaré, l'Egyptienne Natacha Atlas ou les Sud-africains Ladysmith Black Mambazo, Andy Kasrils ou Ewok, par exemple, mais aussi les Sud-africains du comité Artists Against Apartheid ou les Kenyans du Palestine Solidarity Committee, récemment engagés contre un festival du film israélien organisé à l'Alliance française de Nairobi (2). C'est en effet quand les Etats se mêlent de culture que les artistes, mais aussi les spectateurs, se rendent compte du rôle politique qu'ils jouent, et sinon qu'on leur fait jouer...


Par ailleurs, la Campagne BDS, en France et en Afrique du Sud, a également publié plusieurs communiqués, une page facebook et une pétition sur "l'affaire Salif Keita", avec ses revirements et sa difficulté d'assumer une décision:

Et pour ce qui est du racisme anti-africain en israel, encore une pièce à apporter au dossier: Israël: un hôpital interdit aux Noirs
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Lettre de Roger Waters à tous les musiciens de rock ci-dessous...

 
Roger Waters appelle les musiciens Rock and Roll à s'engager dans le boycott culturel d'Israël
Roger Waters, 18 août 2013, Varsovie.

À mes collègues du Rock and Roll.

Au lendemain de l'assassinat du jeune Trayvon Martin et de l'acquittement de son meurtrier Zimmerman, Stevie Wonder a déclaré, durant son concert, qu'il ne se produirait plus jamais dans l'État de Floride tant que ce dernier n'abrogera pas sa loi « Défendez Votre Territoire » (« Stand Your Ground Law »).
Il a, en fait, décidé d'un boycott, guidé par sa conscience. J'applaudis sa prise de position, et la soutiens totalement. Cela m'a rappelé ce que j'avais écrit dans une lettre que j'ai commencé à rédiger en février dernier, à laquelle j'ai déjà fait référence, mais que je n'ai jamais publiée.

Le moment est venu, alors la voici.

Ça fait longtemps que cette lettre mijote sur le feu de ma conscience. Voilà sept ans que j'ai rejoins le BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions), un mouvement non-violent qui s'oppose à l'occupation israélienne de la Cisjordanie, ainsi qu'aux violations de la loi internationale et des droit du peuple Palestinien commises par Israël.

L'objectif du BDS est de porter à l'attention du monde les politiques mises en place par Israël et, nous l'espérons, de pouvoir y mettre fin. Toute la population de cette région mérite mieux que la situation dans laquelle elle se trouve.

Pour faire court, Israël a été reconnu coupable par les organisations internationales des droits de l'homme, les officiels des Nations Unies et la Cour Internationale de Justice de sévères violations de la loi internationale.

Parmi ces violations, j'en nommerai deux :

1. Le crime d'apartheid :
L'oppression systématique d'un groupe ethnique par un autre.
Le 9 mars 2012, par exemple, le comité pour l'élimination de la discrimination raciale a appelé Israël à mettre un terme à ses politiques racistes et à abroger ses lois contrevenant à l'interdiction de la ségrégation raciale et de l'apartheid1.

2. Le crime de nettoyage ethnique:
Le déplacement forcé de populations indigènes de leurs terres dans le but d'y installer des occupants.
Par exemple, à Jérusalem Est, les familles non-juives sont régulièrement expulsées de manière violente de leurs maisons pour faire la place aux occupants juifs.

Il y a d'autres exemples.

Étant donnée l'incapacité, ou le manque de volonté, de nos gouvernements et du conseil de sécurité des Nations Unies à faire pression sur Israël afin que cessent de telles violations, et que les victimes soient indemnisées, il incombe à la société civile et aux citoyens de conscience du monde entier de prendre leurs responsabilités et d'agir.

Je vous écris maintenant, mes frères et mes soeurs de la famille du Rock and Roll, pour vous demander de vous joindre à moi, et aux milliers d'autres artistes du monde entier, pour déclarer un boycott culturel d'Israël afin d'exposer cette situation et de soutenir tous nos frères et soeurs palestiniens et israéliens qui se battent pour mettre fin à toutes formes d'oppression de la part d'Israël. Nos frères et soeurs qui veulent vivre en paix, qui veulent la justice, l'équité et la liberté.

Deux événements récents m'ont poussé à vous écrire à tous.

1. Stevie Wonder.
J'ai entendu dire que Stevie Wonder allait donner un concert pour la soirée de gala des Amis des Forces de Défense Israéliennes (Friends of The Israeli Defense Forces) à Los Angeles le 6 décembre 2012.
Pour récolter des fonds pour les forces armées israéliennes, comme si les 4 300 000 000 de dollars que les contribuables américains leur donnent chaque année ne suffisait pas ?
Et cela, juste après que les Forces de Défense Israéliennes aient achevé une nouvelle attaque sur Gaza (opération Pilier de Défense) que l'association Human Rights Watch a qualifiée de crime de guerre contre les 1.6 millions de Palestiniens assiégés là-bas.
J'ai écrit à Stevie, pour essayer de le convaincre d'annuler. Ma lettre disait à peu près ceci : « Aurais-tu pu jouer au bal des policiers de Johannesburg, la nuit suivant le massacre de Sharpeville en 1960 ou à Birmingham, Alabama, pour récolter de l'argent pour les officiers qui tabassaient à coups de matraque, aveuglaient au gaz lacrymogène et dispersaient au canon à eau, ces enfants qui essayaient de s'intégrer en 1963 ? »
L'archevêque Desmond Tutu a également adressé un appel passionné à Stevie, et 3000 autres ont inscrit leurs noms au bas d'une pétition de change.org.
Et Stevie, c'est tout à son honneur, a annulé sa prestation.

2. Plus tôt cette année, j'ai tenu un discours aux Nations Unies.
Si cela vous intéresse, vous pouvez le trouver sur youtube.

Il est remarquable qu'aucun de ces deux « événements » n'ait été mentionné, pas même une fois, dans les médias de masse aux États-Unis.
Il est clair que cette attitude des médias étasuniens reflète un désintéressement total envers le problème du peuple palestinien, et celui du peuple israélien.
Nous ne pouvons qu'espérer qu'ils finissent par s'y intéresser, comme ils ont fini par s'intéresser à la politique d'apartheid Sud Africaine.

À l'époque de l'apartheid en Afrique du sud, seul un petit groupe d'artistes a refusé d'y jouer dans un premier temps. Seuls quelques-uns pratiquaient le boycott culturel. Une goutte d'eau. Qui est devenue une rivière, qui est devenue un torrent, qui est devenu un ras-de-marée.
(Vous souvenez-vous de Steve van Zandt, Bruce et tous les autres ? « Nous ne jouerons pas à Sun City ! »)
Pourquoi ? Parce que comme les Nations Unies et la Cour Internationale de Justice, ils avaient compris que l'apartheid était mauvais.
Puis la communauté sportive a rejoint la lutte. Aucune équipe n'allait jouer au rugby ou au cricket en Afrique du Sud. Et la communauté politique a fini par se joindre à nous. Ensemble, dans un mouvement global, nous, musiciens, sportifs, politiques avons élevé nos voix comme une seule, et le régime d'apartheid Sud Africain est tombé.

Nous atteignons peut-être le point de basculement en ce qui concerne Israël et la Palestine. Ces deux peuples sont bons, et ils méritent une solution juste à leur problème. Chacun d'entre eux mérite la liberté, la justice, l'égalité des droits.

Dernièrement, le Congrès National Africain (ANC), le parti qui est à la tête de l'Afrique du Sud, a affirmé son soutien au BDS.

Nous y sommes presque. Je vous prie de nous rejoindre, moi et tous nos frères et soeurs de la société civile, pour clamer notre refus de l'apartheid en Israël et en Palestine occupée. Engageons-nous à ne pas nous produire en Israël, à n'accepter aucune récompense, aucune subvention provenant d'institutions liées au gouvernement d'Israël, jusqu'à ce qu'Israël se conforme à la loi internationale et aux principes universels des droits de l'Homme.
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Pour ceux qui ne le connaissent pas, Nigel Kennedy est un virtuose anglais du violon classique, extrêmement populaire partout dans le monde, connu aussi pour ne pas respecter le cérémonial classique, et venir habillé en punk lors de concerts où il est premier violon...


Le 8 août, il a été invité à donner un concert au Royal Albert Hall de Londres, avec le conservatoire national palestinien Edward Said. Entre deux morceaux, il a précisé: "c'est peut-être un peu facile à dire, mais nous savons tous par l'expérience de cette soirée de musique que de donner l'égalité à tous et de se débarrasser de l'apartheid donne une chance magnifique pour que des choses formidables se produisent". Le concert a été retransmis à la BBC, mais les rediffusions ont amputé cet extrait...

Il a donc publié la déclaration officielle ci-dessous...

Déclaration officielle au nom de Nigel Kennedy, contre sa censure par la BBC

Nigel Kennedy estime incroyable, et assez effrayant, qu'au XXIe siècle, il y ait toujours un tel problème insurmontable pour dire les choses comme elles sont. Il pense qu'une fois que nous aurons réussi à faire face aux problèmes pour ce qu'ils sont réellement, nous aurons enfin une chance de trouver les solutions à des problèmes comme les droits humains, les droits à légalité et même, peut-être, la liberté d'expression. Sa première réaction à la censure par la BBC et à son manque impérial d'impartialité a été de refuser de jouer pour un employeur qui est influencé par des forces extérieures si contestables.

Mr Kennedy a toutefois rappelé que son principal objectif est de donner au public la meilleure musique qu'il peut produire. Retirer ses services ce serait comme si un chauffeur de taxi refusait de conduire ses clients parce qu'ils seraient politiquement incorrects. Par conséquent, il ne retire pas les services qu'il doit au public, mais il s'attend à moitié à être remplacé par quelqu'un jugé plus conforme en vertu de son opportunisme débordant et de ses ambitions professionnelles.

Cependant, Mr Kennedy est heureux que, en le censurant, la BBC ait créé une si immense plate-forme pour débattre de sa propre impartialité, de son respect (ou non-respect) de la liberté d'expression et pour débattre du lamentable apartheid imposé au peuple palestinien par le gouvernement israélien soutenu par tant de gouvernements du monde extérieur.

Pour Mr Kennedy, sa très petite déclaration durant son concert était purement descriptive, et en aucune façon politique.
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Jazz


Ce mois ci, les musiciens de jazz Chris "Daddy" Dave, Pino Palladino, Kebbi Williams, Isaiah Sharkey, Matt Schofield, Jonny Henderson et Kevin Hayes ont annulé leur participation au festival de jazz d'Eilat!
http://tinyurl.com/k7rg3dz
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Palestine / France


La campagne BDS France a pu se réjouir quelques jours de la relaxe de 3 de ses militants de Perpignan dont les actions de boycott n'ont PAS été jugées comme incitant à une quelconque haine raciale... Néanmoins, comme le veut la circulaire Alliot-Marie, le procureur a fait appel...

Le Mur a des Oreilles, une nouvelle émission mensuelle sur la Palestine en français sur une radio belge:
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La Gauche française


Après la polémique autour de Daniel Mermet, puis celle autour de Clément Méric, voici celle autour d'Agone. Moins détaillée, il est plus difficile de prendre parti, mais la gauche, comme toujours, se déchire:

A propos de féminisme et d'islamophobie, Mona Chollet et Christine Delphy, en deux parties
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Cocaine


Un vieux blues redécouvert par la génération folk, au premier rang desquels Dave Van Ronk (qui a tout appris à Bob Dylan) en 1967, une version reggae-dub par Dillinger en 1976, et un retour à une version blues dépouillée, par Keith Richards en 1994. Ce n'est pas le country de Roy Hogsed et Johnny Cash, ni le blues de J.J. Cale et Eric Clapton, mais c'est un thème qui inspire apparemment...
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Vidéos

Trios sans guitare:
Morphine, basse, batterie et saxophone baryton, dans les années 1990:


Elyas Khan, basse, batterie et des cloches, en 2013:


1h de Stevie Wonder, toujours dans le cadre du Summer of Soul 2013 sur Arte:
http://www.arte.tv/guide/fr/048865-000/stevie-wonder
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Audio


Un peu plus d'1h avec Bettye Lavette, soul bluesy le mois dernier au North Sea Festival de Rotterdam.

Au même endroit, 1h15 de blues avec Mud Morganfield, le fils de Muddy Waters, qui imite bien feu son père.

40 minutes d'un concert inédit de Bobby Bland, le 8 octobre 1975 au Boarding House de San Francisco, avec Wayne Bennett à la guitare.

Je n'ai pas encore écouté ce Dictionnaire du Rock'n'Roll, 26 émissions de radio consacrées au racines du rock, avec rythm and blues, boogie woogie,  bebop, rock n'roll, old school, mais ça a l'air sympa...

1 commentaire:

Pop9 a dit…

(Nostalgie.) Pas mal, Morphine, il y avait une atmosphère.